J'ai toujours pensé que demander le film préféré de quelqu'un revenait à lui demander lequel de ses cheveux il/elle trouvait le plus beau. Premièrement ça n'a aucun sens, et puis c'est un peu embêtant si la personne est chauve... Pour cette raison, je suis convaincue qu'une accumulation de spécimens uniques serait toujours plus représentatif qu'un seul et unique spécimen. Pareil pour les classements : la plupart du temps, c'est assez difficile de classer ses cheveux par ordre de préférence. J'ai donc demandé à mes deux parents de me fournir la meilleure mèche qu'ils pourront trouver dans leur chevelure respective. Je me suis ensuite fixée comme défi d'y relever l'ADN, de l'analyser, et de tenter d'en sortir une conclusion générale. Sous cette étude faussement scientifique, se cache probablement le désir d'en apprendre plus sur mes racines, et donc sur moi-même. Ou bien je tente inconsciemment de réunir mes deux parents divorcés. Je préfère ne pas trouver de réponse à cette question...

 

La mèche de cheveux de ma mère rassemble : Forrest Gump ; Le dictateur ; The Kid ; Les temps modernes ; La cité de la peur ; La leçon de piano ; Les aventuriers de l'Arche perdue ; Le cercle des poètes disparus ; Mon voisin Totoro ; Rain Man ; Amadeus ; Apocalypse Now ; Orange mécanique ; Les valseuses ; Le bon la brute et le truand ; Les Oiseaux ; Django Unchained ; Intouchables ; Rebelle ; Do The Right Thing ; La ruée vers l'or ; Good morning Viet Nam ; Vol au dessus d'un nid de coucou ; Merci patron ; L'idiot ; Le Décalogue ; West Side Story ; Cry Freedom ; E.T. L'extraterrestre ; Million Dollar Baby ; Kirikou ; Wall E ; La vie est belle (1998) ; Le grand bleu ; Shrek ; Persepolis ; Dancer in the Dark ; Prendre femme ; Charlie et la chocolaterie ; Tchao pantin.

 

La mèche de cheveux de mon père rassemble : Le masque de la mort rouge ; Les Oiseaux ; Psychose ; Phantom of the paradise ; Le Dictateur ; Nosferatu ; Aguirre, la colère de Dieu ; King Kong (1933) ; La Nuit du chasseur ; Quai des brumes ; Pierrot le fou ; Beetlejuice ; Le rayon vert ; Conte d'hiver ; Jules et Jim ; Dersu Uzala ; Les Tontons flingueurs ; Les ailes du désir ; Brazil ; Taxi Driver ; Persona ; Paterson ; Django Unchained ; Do the right Thing ; Cri et chuchotements ; La strada ; Le vent se lève ; Avatar ; Je suis un autarcique ; Starship Trooper ; La ligne rouge ; La Mouche ; Il était une fois dans l'Ouest ; Pale Rider, le cavalier solitaire ; Rivière sans retour ; Rio grande ; Fargo ; La montagne sacrée ; The Gran Budapest hotel ; Apocalypse Now ; Lost in translation ; Démineurs ; Drive ; Sur la route de Madison ; Chantons sous la pluie ; Il fait sauver le soldat Ryan ; Shining ; Easy Rider ; Blue Velvet ; La petite boutique des horreurs (1960) ; Suspiria ; Pat Garett et Billy the kid ; Roma ; Les yeux sans visage.

 

Mes premières observations ne font que confirmer ce que je sais déjà depuis un bon moment : mon père est plus cinéphile que ma mère. Ça, ce n'est pas une surprise. La liste de ma mère s'élève à 40 films, tandis que celle de mon père frôle les 55 films. La nationalité des films est plus variée dans la seconde que la première : on note cependant une majorité écrasante de films américains dans les deux listes. Et puisqu'on en est à trouver des points communs, allons-y : il y a cinq films en commun (Django Unchained ; Le Dictateur ; Apocalypse Now ; Do the right thing ; Les Oiseaux), et dix réalisateurs en commun (Quentin Tarantino, Clint Eastwood, Stanley Kubrick, Hayao Miyazaki, Francis Ford Coppola, Tim Burton, Alfred Hitchcock, Spike Lee, Sergio Leone et Charlie Chaplin). En calculant la moyenne des genres, on arrive à peu près au même nombre dans les genres suivants : science-fiction, western, guerre, musical. Et on remarque enfin une supériorité de films dramatiques au profit des comédies.

 

Cependant, on distingue un certain nombre de variables entre les deux listes. Clairement, là où le genre de l'horreur domine (11 films contre 1 seulement) du côté du père, c'est l'animation (6 contre 1) qui reprend la main dans la liste de la mère. De plus, si on met de côté les films américains, la mère privilégie les films français (9), là où le père alterne entre film français (7), italien (5), japonais (2), suédois (2), allemand (2) et anglais (2). Pour finir, on remarque une grosse différence au niveau des périodes privilégiées. En effet, la mère possède plus de films datant des années 1980 et des années 2000 (12 pour chaque période), alors que le père est plus disparate, mais le pic se situant plutôt dans les années 1960 et 1970. Dans les deux cas, seules les années 90 sont peu représentées, et on peut émettre l'hypothèse que ce faible nombre s'explique par la rencontre de mes parents à cette époque, et la naissance successive de ma propre personne (1994) puis de ma sœur (1997).

 

À présent il me reste à comparer ce que j'ai appris de ces deux listes, avec ma propre cinéphilie : est-elle proche ? Éloignée ? Est-ce qu'elle m'a influencée ? Et si oui en quoi ?

Je vais commencer par énoncer une évidence : je ne suis pas de la même génération que mes parents, et par conséquent il est assez compliqué de comparer des cinéphilies qui seront forcément discordantes. Mais je vais essayer. De ce que je sais de moi, c'est que le genre qui m'attire le plus, c'est la romance. J'ai des goûts assez hétéroclites, ceci dit, et je vais avoir tendance à alterner films à gros budget et grosse popularité, avec films à petits budget et moyenne popularité.

 

Ma propre mèche de cheveux rassemble : Le Fabuleux destin d'Amélie Poulain ; Titanic ; Les Lumières de la ville ; The Kid ; Mon Voisin Totoro ; Babe, le cochon devenu berger ; Spirit, l'étalon des plaines ; Inglorious Basterds ; Boulevard de la mort ; Diamants sur canapé ; I'm not there ; Il était une fois dans l'Ouest ; Le Seigneur des anneaux ; Batman ; The Dark knight : le chevalier noir ; Iron Man ; It Follows ; Astérix et Obélix mission Cléopâtre ; Mommy ; Halloween la nuit des masques ; La Guerre des mondes ; Minority Report ; Forrest Gump ; Gravity ; Les Fils de l'homme ; Million Dollar Baby ; Elephant Man ; Pirates des Caraïbes : la malédiction du Black Pearl ; V pour Vendetta ; Chantons sous la pluie ; District 9 ; Watchmen ; Good morning England ; Le secret de Brokeback mountain ; Orgueil et préjugés ; Evil Dead 2 ; Grave ; Frankenstein ; Old Boy ; 12 hommes en colère ; Psychose ; Le Pianiste (2002) ; Under the skin ; Boyhood ; Fight Club ; Elephant ; Stalker ; Tarnation ; Victoria (2015) ; La Vague ; Drive ; La Belle et la Bête (1991) ; Memento.

 

Je retrouve beaucoup de points communs avec l'une ou l'autre liste. Par exemple la présence de Charlie Chaplin, Quentin Tarantino, Sergio Leone, Steven Spielberg, Alfred Hitchcock, Tim Burton, Hayao Miyazaki. Je suis certaine que Burton ne figurerait pas dans cette liste sans mon père. Et Chaplin non plus sans ma mère. En réalité, un certain nombre de films sont soit directement soit indirectement lié à l'un de mes deux parents (en tout, j'en dénombre 15). Il y avait la télévision, avec les films qu'on nous laissait regarder ma sœur et moi (c'est comme ça que j'ai découvert Titanic, Le Fabuleux destin d'Amélie Poulain, Babe le cochon devenu berger), mais aussi le cinéma de quartier fortement encouragé par ma mère (j'y ai vu Spirit, Mon Voisin Totoro), les cassettes vidéos (La Belle et la Bête, Astérix et Obélix, The Kid), les cinémas avec mon père (Pirates des Caraïbes, La Guerre des mondes), sans oublier ceux qui sont intrinsèquement liés à un conseil ou à une expérience personnelle (I'm not there, Batman, Forrest Gump, Million Dollar Baby). Bref, une grande partie de ma cinéphilie est liée à la leur, mais ça je m'en doutais un peu.

 

On peut également ajouter que je savais d'avance trouver peu de films français (4), puisque pendant des années j'ai mené une féroce guerre contre eux (c'est moins le cas aujourd'hui). Il est aussi peu surprenant de voir une écrasante majorité des films dater des années 2000 (en tout, 37 films).

 

Seulement il y a quelques surprises dans mon analyse mathématique. Par exemple, il n'y a pas autant de films d'animation que je le pensais (3), et aucun film de guerre. Il y a trois genres qui se distinguent, dans ma liste : l'horreur (7 films), la science-fiction (8 films) et la romance (11 films). Et ces deux dernières catégories ne sont clairement pas aussi présentes dans les deux premières listes. Je n'explique d'ailleurs pas du tout leur nombre aussi élevé. Mon hypothèse est que j'ai finit par développer ma propre cinéphilie, indépendamment de celle de mes parents, mais je pense aussi que tout est plus ou moins lié... (par exemple, je ne suis pas certaine d'être aussi accro aux films de super-héros aujourd'hui, si mon père ne m'avais pas incité à voir le Batman de Burton...).

 

J'ai encore plus de questions sur moi-même, maintenant que j'ai terminé cet article. Beaucoup de films proviennent de ma culture personnelle ou d'autres expériences cinématographiques non liées à mes parents. Ma liste est, en réalité, un mélange de racines enfantines, et de goûts personnels. Finalement, c'est comme ça que beaucoup de gens grandissent, non ? Avec des racines solidement plantées, pour pouvoir étendre son feuillage le plus loin possible ensuite...

 

Retour à l'accueil